Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/453

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d’Héraclius suppléèrent d’une manière imparfaite aux troupes qu’avait perdues l’empire, et l’or de l’Église réunit sous les mêmes tentes, les noms, les armes et les idiomes de l’Orient et de l’Occident. Il eût été satisfait de la neutralité des Avares ; cependant il conjura le chagan d’agir, non pas en ennemi, mais en défenseur de l’empire, prière qu’il accompagna, pour la rendre plus efficace, d’un présent de deux cent mille pièces d’or. Deux jours après la fête de Pâques, il quitta sa robe de pourpre pour le simple habit d’un pénitent et d’un guerrier[1], et donna le signal du départ. Il recommanda ses enfans à la fidélité du peuple, remit dans les plus dignes mains l’autorité civile et militaire, et autorisa le patriarche et le sénat à défendre ou à rendre Constantinople, si en son absence l’ennemi venait avec des forces supérieures accabler cette capitale.

Première expédition d’Héraclius contre les Perses. A. D. 622.

Des tentes et des armes couvraient les hauteurs des environs de Chalcédoine : mais si on avait mené sur-le-champ les nouvelles levées au combat, une victoire des Persans à la vue de Constantinople aurait été le dernier jour de l’Empire romain. Il n’eût pas été plus sage de pénétrer dans les provinces de l’Asie, en laissant sur ses derrières une cavalerie innombrable, qui pouvait intercepter les convois, et harceler sans cesse une arrière-garde fatiguée et

  1. Il quitta ses brodequins de pourpre, et en prit de noirs, qu’il teignit ensuite dans le sang des Perses. (George de Pisidie, Acroas. III, 118, 121, 122. Voy. les Notes de Foggini, p. 35.)