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portraits des guerriers destinés à conquérir l’Espagne. Toutefois une étincelle de la flamme qui devait ranimer la monarchie espagnole subsistait encore, d’indomptables fugitifs se décidèrent à mener une vie pauvre et libre dans les vallées de l’Asturie ; les robustes montagnards repoussèrent les esclaves du calife, et le glaive de Pélage est devenu le sceptre des rois catholiques[1].

Conquête de l’Espagne par Musa. A. D. 712-713.

À la nouvelle de ces rapides succès, Musa sentit la satisfaction faire place à la jalousie ; il craignit, sans le dire, que Tarik ne lui laissât rien à conquérir. Il partit de la Mauritanie à la tête de dix mille Arabes et de huit mille Africains, et se rendit en Espagne : il avait sous ses drapeaux les plus nobles d’entre les Koreishites. Il laissa à son fils aîné le commandement de l’Afrique, et emmena les trois plus jeunes, qui, par leur âge et leur valeur, se montraient disposés à seconder les entreprises les plus audacieuses de leur père. Il débarqua à Algeziras, où il fut respectueusement accueilli par le comte Julien, qui, étouffant le cri de sa conscience, montrait par ses paroles et par ses actions que la victoire des Arabes n’avait point diminué son attachement pour eux. Cependant il restait à Musa quelques ennemis à soumettre. Les Goths, dans leur tardif repentir, comparaient leur nombre à celui des vainqueurs ;

  1. D’Anville (États de l’Europe, p. 159) rapporte en peu de mots, mais d’une manière très-distincte, la renaissance du royaume des Goths dans les Asturies.