Page:Gide - Œdipe, 1931.djvu/58

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voulait l’interroger. Mon tour vint. Le voici qui pâlit, qui refuse de parler devant l’assistance, puis, m’ayant pris à part, me dit qu’il est dans mon destin de tuer mon père. Cette prédiction, je commençai d’abord par en rire ; mais, devant l’assurance du devin, crus bon pourtant de prendre des précautions ; et la première fut de m’en ouvrir à Polybe, lui disant que, pour éviter ce malheur prédit, le plus sage était de m’éloigner de lui pour toujours, encore qu’il m’en coûtât beaucoup, car je l’aimais. C’est alors qu’il m’apprit, pour me rassurer, que je n’étais pas son enfant, qu’il m’avait adopté et que je n’avais donc, pour ce qui était de lui, rien à craindre. Quant à savoir de qui j’étais fils, il ne pouvait me renseigner. Un berger, en faisant