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le renoncement au voyage

iii

Entre Bou-Saada et M’Silah, lundi.

Impossible d’écrire ce matin ; l’air est glacé. De cinq heures du matin à huit, encoconné dans mes couvertures, je m’efforce d’être hermétique. Le ciel, impeccable hier, se charge et prend, sitôt après le lever du soleil, une hideuse couleur d’onguent gris.

Ce matin je me sens, contre ce pays, plein de haine, et je le déshabite éperdûment. Je m’écoute me rappeler la Troisième Symphonie de Schumann. Je me récite aussi la Sonate au grand-duc Rodolphe, en ut mineur ; mais la partie de violon m’échappe par endroits.

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