Page:Gide - Amyntas, 1906.djvu/209

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alger (blida)

nous nous étonnions d’abord, leur étroitesse, l’étranglement de leur beauté vient de ce que le vigoureux rosier n’interrompt jamais de fleurir. Chaque fleur y éclôt sans élan, sans préméditation, sans attente…

De même l’efflorescence la plus admirable de l’homme exige une préalable torpeur. L’inconsciente gestation des grandes œuvres plonge l’artiste dans une sorte d’engourdissement stupide ; et n’y consentir point, prendre peur, vouloir redevenir trop tôt capable, avoir honte de ses hivers, voilà de quoi, — pour en vouloir de plus nombreuses, — étrangler et faire avorter chaque fleur.

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