Page:Gide - De l’influence en littérature.djvu/36

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redisent, la réfractent, en fassent valoir une nouvelle beauté. — La grandeur, qui paraissait démesurée, de Shakespeare, a longtemps empêché de voir, mais ne nous empêche plus aujourd’hui d’admirer, l’admirable pléiade de dramaturges qui l’entourent. — L’idée qu’exalte l’école hollandaise s’est-elle satisfaite d’un Terburg, d’un Metsu, d’un Pieter de Hooch ? Non, non, il fallait chacun de ceux-là, et combien d’autres !


Enfin, disons que si toute une suite de grands esprits se dévouent pour exalter une grande idée, il en faut d’autres, qui se dévouent aussi, pour l’exagérer, puis la compromettre et la détruire. — Je ne parle pas de ceux qui s’acharnent contre — non — ceux-là d’ordinaire servent l’idée qu’ils combattent, la fortifient de leur inimitié. — Mais je parle de ceux qui croient la servir, de cette malheureuse descendance en qui s’épuise enfin l’idée. — Et, comme l’humanité fait et doit faire une consommation considérable d’idées, il faut être reconnaissant à ceux-ci qui, en épuisant enfin ce qu’une idée avait encore de généreux en elle, en la faisant redevenir idée, de vérité qu’elle semblait être, la privent enfin de tout suc nourricier, et forcent ceux qui viennent à chercher une idée nouvelle, — idée qui, à son tour, paraisse Vérité.

Bénis soient les Miéris et les Philip Van Dijk pour achever de ruiner la moribonde école