Page:Gide - L’Immoraliste.djvu/110

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l’inoccupation même où me laissait enfin ma santé rétablie — je parlai sérieusement de retour ; à la joie qu’en montra Marceline, je compris qu’elle y songeait depuis longtemps.

Cependant les quelques travaux d’histoire auxquels je recommençais de songer n’avaient plus pour moi même goût. Je vous l’ai dit : depuis ma maladie, la connaissance abstraite et neutre du passé me semblait vaine, et si naguère j’avais pu m’occuper à des recherches philologiques, m’attachant par exemple à préciser la part de l’influence gothique dans la déformation de la langue latine, et négligeant, méconnaissant les figures de Théodoric, de Cassiodore, d’Amalasonthe et leurs passions admirables pour ne m’exalter plus que sur des signes et sur le résidu de leur vie, à présent ces mêmes signes, et la philologie tout entière, ne m’étaient plus que comme un moyen de pénétrer mieux dans ce dont la sauvage grandeur et la noblesse m’apparurent. Je résolus