Page:Gide - Le Journal des Faux-monnayeurs 1926.djvu/37

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devenir le sujet central de tout le livre, c’est-à-dire le point invisible autour de quoi tout graviterait.…

Réussite dans le pire, et détérioration des qualités les plus exquises.

Je reprocherais à Martin du Gard l'allure discursive de son récit ; se promenant ainsi tout le long des années, sa lanterne de romancier éclaire toujours de face les événements qu’il considère, chacun de ceux-ci vient à son tour au premier plan; jamais leurs lignes ne se mêlent et, pas plus qu’il n’y a d’ombre, il n’y a de perspective. C’est déjà ce qui me gêne dans Tolstoï[1]. Ils peignent des panoramas; l'art est de faire un tableau. Étudier d'abord le point d'où doit affluer la lumière ;

  1. Dickens et Dostoïewski sont de grands maîtres en cela. La lumière qui éclaire leurs personnages n’est presque jamais diffuse. Dans Tolstoï,les scènes les mieux venues paraissent grises parce qu'elles sont également éclairées de partout. Intérêt successif.