Page:Gide - Le Journal des Faux-monnayeurs 1926.djvu/66

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faut les avoisiner, leur inventer des parents, une famille, des amis, je plie boutique. Je vois chacun de mes héros, vous l'avouerais-je, orphelin, fils unique, célibataire, et sans enfant, C’est peut-être pour ça que je vois en vous un si bon héros, Lafcadio. Non! mais vous imaginez- vous ayant ce qu'on appelle « charge d'âmes »; avec de vieux parents à soutenir, par exemple; une mère paralytique, un père aveugle. C’est que cela se trouve, ces choses-là. Mieux encore: une jeune sœur, délicate de santé, qui aurait besoin de l’air des montagnes.

— Dites tout de suite une coxalgique.

— Songez à ce que serait votre sœur ! À ce que vous seriez avec une petite sœur sur les bras, et qui vous aurait dit un jour : Cadio, mon petit Cadio, depuis la mort de nos parents, tu es tout ce qui me reste au monde...