Page:Gide - Le Voyage d’Urien, Paludes.djvu/28

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avoir marché longtemps comme en songe dans cette tragique vallée, les hautes roches s’étant ouvertes, une mer azurée s’est montrée.

Sur les flots ! Sur les flots, pensai-je voguerons-nous, mer éternelle, vers nos destinées inconnues ? nos âmes excessivement jeunes chercheront-elles leur vaillance ?

Sur la plage, m’attendaient les compagnons de pèlerinage ; je les reconnus tous, bien que ne sachant pas si je les avais vus quelque part. Mais nos vertus étaient pareilles. ― Le soleil était déjà haut sur la mer. Ils étaient arrivés dès l’aube et regardaient monter les vagues. Je m’excusai de m’être fait attendre ; eux me pardonnèrent, pensant qu’en chemin m’avaient arrêté encore quelques subtilités dogmatiques et des scrupules, ― puis me reprochèrent pourtant de ne m’être pas plus simplement laissé venir. ― Comme j’étais le dernier et qu’ils n’en attendaient plus d’autres, nous nous acheminâmes vers la ville au grand port où appareillent les navires. Des clameurs en venaient vers nous sur la plage.