Page:Gide - Philoctète, 1899.djvu/73

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Les livres ne sont peut-être pas une chose bien nécessaire ; quelques mythes d’abord suffisaient. Une religion y tenait tout entière. Le peuple s’étonnait à l’apparence des fables et sans comprendre il adorait ; les prêtres attentifs, penchés sur la profondeur des images, pénétraient lentement l’intime sens du hiéroglyphe. Puis, on a voulu expliquer ; les livres ont amplifié les mythes ; — mais quelques mythes suffisaient.

Ainsi le mythe du Narcisse : Narcisse était parfaitement beau, — et c’est pourquoi il était chaste ; il dédaignait les Nymphes — parce qu’il était amoureux de lui-même. Aucun souffle ne troublait la source, où, tranquille et penché, tout le jour il contemplait son image… — Vous savez l’histoire. Pourtant nous la dirons encore. Toutes choses sont dites