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I

Le Paradis n’était pas grand ; parce que parfaites, les formes n’y fleurissaient chacune qu’une fois, et un jardin les contenait toutes. — S’il était, ou s’il n’était pas, que nous importe ? mais il était tel, s’il était — comme la forme la plus parfaite de Dieu. Tout s’y cristallisait en une forme nécessaire, et tout était parfaitement ainsi que tout devait être. — Tout demeurait immobile, car rien ne souhaitait d’être mieux. La seule calme gravitation faisait lentement évoluer l’ensemble.

Et comme aucun élan ne cesse, dans le Passé ni dans l’Avenir, le Paradis n’était pas devenu, — il était simplement depuis toujours.


Chaste Éden ! Jardin ! jardin des Idées, où les formes, rhythmiques et sûres, révélaient sans