Page:Gide - Philoctète, 1899.djvu/86

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où les choses se font plus lentes, où le temps repose, – l’on croit ; – et comme le bruit, avec le mouvement, cesse, – tout se tait. On attend ; on comprend que l’instant est tragique et qu’il ne faut pas bouger.

« Il se fit dans le ciel un silence » ; prélude des apocalypses. – Oui tragiques, tragiques époques, où commencent des ères nouvelles, où le ciel et la terre se recueillent, où le livre aux sept sceaux va s’ouvrir, où tout va se fixer dans une posture éternelle… mais surgit quelque clameur importune ; sur les plateaux élus où l’on croit que le temps va finir, – toujours quelques avides soldats qui se partagent des vêtements, et qui jouent aux dés des tuniques, – lorsque l’extase immobilise les saintes femmes, et que le voile qui se déchire va livrer les secrets du temple ; quand toute la création contemple le Christ enfin qui se fige en la croix suprême, disant