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III

Le Poète est celui qui regarde. Et que voit-il ? – Le Paradis.

Car le Paradis est partout ; n’en croyons pas les apparences. Les apparences sont imparfaites : elles balbutient les vérités qu’elles recèlent ; le Poète, à demi-mot, doit comprendre, – puis redire ces vérités. Est-ce que le Savant fait rien d’autre ? Lui aussi recherche l’archétype des choses et les lois de leur succession ; il recompose un monde enfin, idéalement simple, où tout s’ordonne normalement.

Mais, ces formes premières, le Savant les recherche, par une induction lente et peureuse, à travers d’innombrables exemples : car il s’arrête à l’apparence, et, désireux de certitude, il se défend de deviner.

Le Poète, lui, qui sait qu’il crée, devine à