positions, et il ne lui restera plus qu’une ressource : ce sera de transporter la population et les capitaux qui peuvent lui rester encore dans les pays mêmes qui lui font cette concurrence victorieuse[1], afin d’y bénéficier tout au moins des conditions qui leur assurent cette supériorité. Si la France ne peut plus soutenir la concurrence de l’Amérique, qu’elle émigre en Amérique ! Telle serait la conséquence logique d’un système qui ne voit dans le commerce international que le mode d’organisation le mieux fait pour tirer le meilleur parti possible de la terre et des hommes qui la peuplent, sans s’inquiéter de ce fait que ces hommes sont divisés par nations et que chacune de ces nations a la volonté et le droit de vivre.
On comprend à la rigueur, quand il ne s’agit que des individus, qu’un darwinien convaincu puisse les sacrifier en vue des intérêts généraux de l’espèce, mais on ne peut demander à un pays de se laisser immoler au nom des intérêts généraux de l’humanité. Ce serait d’autant plus absurde qu’il n’y a ici en jeu qu’une question de supériorité économique et commerciale : or un peuple a un autre rôle à jouer en ce monde que celui de simple producteur économique. Faut-il donc courir le risque que quelque Grèce nouvelle soit un jour éliminée d’entre les nations parce que son sol aride ne lui aura pas permis de produire à aussi bon marché que ses rivales ?
2° En admettant même qu’aucun pays ne succombât dans cette lutte et que chacun réussit à trouver une branche de production où il conserverait sa supériorité et où il ferait refluer toutes ses forces productives, serait-ce là un résultat désirable ? — L’école libre-échangiste l’affirme parce qu’elle ne voit là qu’une vaste application de la loi de la division du
- ↑ C’est précisément le résultat que produisent à l’intérieur la concurrence et le commerce entre les différentes parties d’un même pays. Il se peut que la liberté et la facilité des communications entre le Cantal et Paris entraîne la population et la mort industrielle de cette province : mais ici, comme c’est une portion de la France qui gagne ce que l’autre perd, il n’y a pas lieu, au point de vue national, d’intervenir.