Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/362

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Il suffit donc de lire le cours des changes, quand bien même on n’aurait d’ailleurs aucune connaissance de l’état économique et financier des différents pays, pour se rendre un compte exact de leur situation, pour deviner s’ils achètent plus qu’ils ne vendent ou s’ils vendent plus qu’ils n’achètent, s’ils ont une monnaie dépréciée et quel est au juste le montant de cette dépréciation.

3o Enfin toutes les fois qu’un débiteur éprouve de la peine à se procurer de l’or, soit parce que le crédit est resserré, soit parce que les banques font des difficultés pour escompter, soit parce que la balance du commerce ou plutôt des dettes a drainé l’or du pays, il se peut que le cours du change s’élève fort au-dessus du pair. Par exemple, lors du paiement de l’indemnité de cinq milliards à l’Allemagne, la France aurait eu bien de la peine à ramasser assez d’or pour régler cette énorme rançon ; aussi le gouvernement français, pour s’acquitter, recherchait-il partout le papier sur l’Allemagne ou même sur Londres, afin de payer par voie d’arbitrage[1] ; aussi le cours du change sur l’Allemagne ou même sur Londres se maintint longtemps, et non seulement en France mais partout, fort au-dessus du pair.

  1. L’arbitrage n’est qu’une opération de change, mais plus compliquée.
    La voici en deux mots. Ce n’est pas seulement à Paris qu’on trouve du papier sur Londres, il en existe sur toutes les places commerciales du monde. Si par conséquent il est trop cher à Paris, on peut chercher une autre place où, par suite de circonstances différentes, il sera à meilleur marché : or, cette opération qui consiste à acheter le papier là où il est bon marché pour le revendre là où il est cher, est précisément ce qu’on appelle l’arbitrage.
    L’arbitrage produit cet effet intéressant d’étendre à tout pays les facilités du paiement par compensation. La cherté du papier caractérise en effet un pays où les dettes dépassent les créances et qui, en conséquence ne pourrait se libérer tout seul par voie de compensation. Mais par le moyen du papier que ses arbitragistes iront lui chercher à l’étranger (et qu’ils iront prendre précisément dans les places qui se trouvent dans une situation inverse, c’est-à-dire là où les créances dépassent les dettes, car c’est là seulement qu’on trouvera du papier à bon marché), ce pays pourra rétablir l’équilibre et régler la totalité de ses dettes par compensation.