Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/370

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de rentes ou des actions ou obligations de chemins de fer ; — aux propriétaires emprunteurs, elles offrent le triple avantage : 1° d’un emprunt à longue échéance, 75 ans par exemple ; 2° d’un remboursement s’opérant petit à petit et d’une façon presque insensible par voie d’annuités ; 3° et enfin, en général, d’un taux d’intérêt relativement modéré[1].

Nous n’apprécions pas beaucoup, du reste, l’utilité du crédit foncier, quelques formes ingénieuses qu’on lui donne. Sans prétendre formuler ici un principe absolu, nous ne pensons pas qu’il y ait un intérêt social à faciliter au petit propriétaire les moyens d’emprunter : pour une fois qu’il y trouvera une occasion de fortune, dix fois il y trouvera une cause de ruine. Nous serions plutôt disposés, nous inspirant d’une idée tout opposée, à réclamer l’adoption de certaines mesures, telles que l’homestead des États-Unis qui enlève au propriétaire la faculté d’emprunter sur sa terre — du moins quand il s’agit de la petite propriété — car pour la grande, les suites fâcheuses de l’emprunt sont moins à redouter et si même l’expropriation devait en être la conséquence, on pourrait plus aisément, au point de vue social, s’en consoler[2].

  1. En France, il n’existe qu’une seule société de ce genre puissante Compagnie qui est investie d’un monopole depuis 1852, sous le nom de Crédit Foncier de France. Ce grand établissement prête pour une période de 75 ans. L’intérêt n’est pas de beaucoup inférieur à 5 %, mais ce taux comprend une annuité calculée de façon à éteindre le capital dans une période de 75 ans, de sorte qu’à l’arrivée du terme le propriétaire se trouve libéré de toute dette, tout en ayant payé un intérêt un peu moindre que celui qu’il aurait dû payer à un créancier ordinaire. Malgré ces ingénieuses combinaisons, les services que le Crédit Foncier a pu rendre à l’agriculture ne sont pas considérâmes la somme des capitaux déjà prêtés s’élève bien au chiffre imposant de près de 3 milliards, mais la plus grande partie a été employée à des constructions dans les villes et c’est à peine si le quart est allé à la propriété rurale. On ferait donc mieux de l’appeler le Crédit Urbain !
  2. En vertu de la loi du homestead, tout propriétaire américain, cultivant lui-même sa terre, peut faire déclarer insaisissable sa maison, avec une certaine étendue de terre à l’entour, jusqu’à concurrence d’une certaine valeur dont l’importance est variable suivant les législations des États, mais ne dépasse pas 2.000 dollars (10.000 fr.). Quelquefois même cette exemption n’est pas facultative, mais de droit, et il nous semble qu’elle ne peut guère être efficace que dans ce cas. Il va sans dire que le propriétaire ainsi protégé doit renoncer à trouver crédit, du moins