Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/419

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Il est exact que la perspective d’une rente fournie par l’assistance publique peut tendre à réduire l’activité productrice ou l’épargne : mais pourquoi ne pas en dire autant des rentiers que nous venons de voir tout à l’heure ? la certitude d’une retraite, l’espérance d’un héritage, ou simplement la possession d’un titre de rente produisent ce fâcheux effet exactement de la même façon.

Il est exact que le chiffre des naissances est plus élevé dans les classes assistées que dans les classes qui ont à se suffire à elles-mêmes ; mais pourvu que l’on cherche à faire de ces enfants des citoyens utiles, ce sera non un mal mais un bien, surtout en France où les classes riches ne veulent plus ou ne peuvent plus produire d’enfants.

Il est exact que l’entretien et la conservation dans la société de tous ceux qui sont malades, infirmes ; incapables, paresseux, peut nuire à l’évolution économique du corps social ; mais l’évolution morale n’est pas de moindre importance et celle-ci se trouverait lamentablement sacrifiée dans une société qui se ferait un cœur de pierre et prendrait pour règle l’élimination impitoyable de tous les misérables.

C’est une question très discutée que celle de savoir si le nombre des indigents, ou « le paupérisme » tend fatalement

    être, si possible, divisés en trois catégories correspondant à la classification tripartite que nous avons indiquée. Pour les secours à domicile, l’assistance légale est impuissante, du moins sans le concours de l’assistance privée. C’est justement cette alliance heureuse de l’assistance publique et de la charité privée qui fait la supériorité du fameux système d’Elberfeld que nous ne pouvons analyser ici (Voy. dans la Revue d’Économie Politique de 1887, Le système d’Elberfeld, par Saint Marc).
    3° Enfin elle implique rigoureusement l’interdiction de la mendicité légale. Si, en effet, les indigents peuvent se procurer des secours sans travailler, en mendiant, aucune organisation d’assistance rationnelle ne pourra fonctionner. Mais il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs en interdisant la mendicité avant d’avoir organisé l’assistance publique. La loi peut défendre à un homme de tendre la main après qu’elle lui a ouvert un établissement d’assistance, mais non quand elle l’abandonne à son sort et le laisse mourir de faim. C’est pourtant ainsi que se passent les choses en France. La mendicité est punie comme délit (ce qui n’empêche pas d’ailleurs les mendiants de pulluler) et le vagabondage, c’est-à-dire le fait « de n’avoir ni domicile ni moyens d’existence », est également un délit ! C’est une législation à refaire.