C’est ce que demandent les socialistes. C’est une charge colossale que va assumer l’État s’il assure les salariés contre tous les risques que nous venons d’énumérer, même en se récupérant sur les patrons d’une partie des frais ; il faudra doubler du coup tous les budgets. Et d’ailleurs ce n’est pas seulement une question de budget, mais les économistes ont bien quelque sujet de protester contre une mesure qui, par sa généralité, aurait pour effet d’affaiblir la prévoyance et la responsabilité dans les classes salariées.
3° Enfin l’État peut se contenter de faciliter l’assurance en créant certains organes spéciaux mais facultatifs pour la faire aux meilleures conditions possibles, de même qu’il a créé par exemple des caisses d’épargne postales.
C’est un mélangé de tous ces types qui a été réalisé en Allemagne. Le gouvernement allemand sous l’inspiration du prince de Bismarck — par trois lois successives, celle de 1883 sur la maladie, celle de 1886 sur les accidents, celle de 1889 sur la vieillesse — a constitué tout un vaste système d’assurances qui fait entrer bon gré mal gré tous les patrons et ouvriers de l’industrie ou de l’agriculture dans de vastes corporations industrielles et régionales. Pour la prime d’assurance contre les accidents, les frais sont entièrement à la charge des patrons ; — pour la prime d’assurance contre les maladies, 1/3 seulement est à la charge des patrons, les 2/3 à la charge des ouvriers ; — pour la prime d’assurance contre la vieillesse et l’invalidité, la moitié est à la charge du patron, la moitié à la charge de l’ouvrier : toutefois, comme les charges sont ici beaucoup plus considérables, l’État vient au secours des uns et des autres en s’engageant à verser une somme de 50 m. (62 fr. 50) pour chaque retraité. — Ce mécanisme, qui englobe 18 millions d’assurés, constitue la plus grandiose expérience de socialisme d’État qu’on ait encore osé tenter[1].
En France on répugne à l’assurance obligatoire comme à faire de l’État l’assureur général. Mais depuis quelques
- ↑ Le système allemand a donné lieu aux critiques les plus vives, no-