Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/510

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l’intérêt n’était pas plus élevé qu’au milieu de ce siècle, et au XVIIIe siècle, en Hollande, il était déjà tombé aussi bas qu’aujourd’hui.

Quant aux prévisions sur la diminution des risques courus par les capitaux et la diminution de leur productivité, elles ne peuvent être que bien incertaines. Pour les risques d’abord, pense-t-on qu’il y ait aujourd’hui moins de débiteurs insolvables, moins de faillites, moins de colossales escroqueries, moins de capitaux engloutis dans des entreprises aventureuses qu’au temps jadis et par conséquent pourquoi se croire autorisés à conclure qu’il en sera différemment dans l’avenir ?[1] — En ce qui concerne la productivité, il est certain que si l’on considère une même industrie, par exemple, celle des chemins de fer ou l’éclairage au gaz, il y a une limite à leur développement, mais si l’on considère la production en général, comme les industries anciennes sont sans cesse remplacées par de nouvelles, rien n’autorise à croire que les transports par ballons, par exemple, seront moins rémunérateurs que ceux par chemins de fer, ou l’éclairage électrique (ou à l’acétylène) que l’éclairage au gaz[2].

En résumé, ce qui nous paraît le plus probable c’est que le taux de l’intérêt, après avoir atteint un certain point minimum dont nous ne sommes plus sans doute bien éloignés, se relèvera, et qu’il passera dans l’avenir par les mêmes longues périodes alternantes de hausse et de baisse que dans le passé.

  1. Il faut même tenir compte d’un risque nouveau, celui qui résulte des grèves et aussi des charges que les lois tendent à imposer de plus en plus aux patrons et aux rentiers.
  2. C’est M. P. Leroy-Beaulieu, défenseur ardent de la thèse de l’abaissement progressif du taux de l’intérêt, qui a surtout développé cet argument auquel il attache une grande importance. Cependant cet argument qui se fonde en somme sur une croyance pessimiste — celle d’une limite fatale imposée à l’industrie humaine — ne parait pas s’accorder très bien avec les vues de l’auteur qui sont généralement très optimistes tant pour la production que pour la répartition. Cette contradiction se révèle d’une façon curieuse dans ce fait que M. Leroy-Beaulieu, qui admet la décroissance de la productivité du capital, n’admet pas la loi du rendement non proportionnel dans l’agriculture et gourmande sur ce point Ricardo et Stuart Mill ! — Voy. dans le même sens, Saugrain, La baisse du taux de l’intérêt.