Page:Gide - Principes d’économie politique.djvu/518

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Il n’y a que deux causes qui puissent enrayer ou faire rétrograder ce mouvement ascensionnel. La première, c’est la concurrence de terres nouvelles s’exerçant a ta suite de grandes entreprises de colonisation et de grands perfectionnements dans les moyens de transport, comme celle qui se manifeste précisément en ce moment avec une intensité surprenante. Mais c’est là, si j’ose dire, un simple accident dans l’histoire économique. Il y a eu un tel essor de défrichement dans la seconde moitié de ce siècle sur des terres inoccupées que l’offre des produits agricoles a dépassé les besoins, mais ce phénomène n’aura qu’un temps et quand ces pays neufs seront peuplés, la loi de la rente foncière reprendra sa marche, un moment interrompue.

La seconde cause, ce serait quelques grands et soudains perfectionnements dans l’art agricole. Sans avoir besoin de recourir comme Ricardo à l’hypothèse d’un délaissement des terres les moins productives, il suffit de réfléchir que tout progrès agricole doit avoir pour effet, par la multiplication des produits, d’abaisser leur utilité finale et par contre-coup celle de la terre elle-même.

Il est à remarquer que ni l’une ni l’autre de ces deux causes de baisse ne s’applique aux terrains à bâtir et voilà bien aussi pourquoi, entre toutes les valeurs, il n’en est aucune dont la hausse ait été plus étonnante que celle de ces terrains et, entre toutes les dépenses, aucune qui ait plus augmenté que celle du loyer[1].


    24.85.0000 en 1879). Mais elle aussi a certainement fortement baissé depuis, et pour les mêmes causes qu’en France.

  1. M. Levasseur (De la valeur et du revenu de la terre en France) cite le fait suivant. En 1234, un cordonnier anglais achetait à Paris, au faubourg Montmartre, un terrain de 2 hectares 70 ares pour une rente de 245 fr. représentant un capital de 2.450 fr. Aujourd’hui ces terrains sont cotés au prix de 1.000 fr, le mètre au moins, ce qui représente donc une valeur totale de 27 millions (non compris les maisons bâties dessus, bien entendu). Voyez de nombreux exemples dans l’Histoire des prix du vicomte d’Avenel.
    Mieux encore. Le mardi 10 septembre 1895, à Lombard Street dans la Cité de Londres, mais au fond d’une petite cour, une petite parcelle de terrain à bâtir, de 57 mètres carrés, a été vendue 1.890.000 fr., soit à raison de 33.000 fr. le mètre !