conde : invariabilité dans le temps. Toutefois, même à ce point de vue, la valeur des métaux précieux varie moins que celle des autres marchandises.
La principale cause, en effet, qui fait varier la valeur d’une chose d’une époque à une autre, c’est la variation dans sa quantité. Si on suppose un produit de telle nature que sa quantité soit susceptible de varier depuis zéro jusqu’à un chiffre très considérable, les variations de valeur seront extrêmes c’est le cas du blé par exemple. Avant la récolte, les greniers sont d’ordinaire à peu près vides : après, ils sont pleins, et la différence entre une bonne et une mauvaise année peut aussi être énorme. De là, variations considérables dans la valeur de cette denrée, et qui seraient encore bien plus excessives si la facilité des transports et l’échange international ne maintenaient un certain équilibre dans la production.
Dans un torrent qui se précipite, les moindres crues se manifestent par des changements de niveau énormes, mais les plus fortes crues du Rhône n’élèvent le niveau du lac de Genève que de quelques centimètres. Même phénomène pour les valeurs. À raison de leur durée, qui fait que les mêmes particules de métal monnayées et remonnayées peuvent traverser les Ages, les métaux précieux s’accumulent petit à petit en une masse imposante, dans laquelle la production annuelle se déverse comme dans un réservoir toujours grandissant, et dans laquelle, par conséquent, les variations accidentelles vont s’atténuant de plus en plus.
Supposez que la récolte du blé vienne une année à doubler dans le monde entier le stock se trouvant également doublé, l’avilissement des prix sera effroyable. Supposez au contraire, que la production des mines d’or ou d’argent vienne à doubler en une année : comme cette production représente à peine 5 % du stock existant, l’effet produit sera peu de chose[1].
Et toutefois ces variations finissent par être sensibles à la
- ↑ La quantité de monnaie métallique circulant dans le monde à cette heure est évaluée au moins à 40 milliards, et la production annuelle dans ces dernières années n’a guère dépassé 2 milliards, dont à peu près moitié argent et moitié or.