Page:Gilbert - Le Dix-huitième Siècle, 1776.djvu/27

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Mais par eux, fans rien faire, un fat nous en impose j
Turpin n’est que Turpin, Suard est quelque chose.
O combien d’Ecrivains languiraient inconnus,
Qui, du Pinde Français illustres Parvenus,
En servant ce parti, conquirent nos hommages !
L’encens de tout un peuple enfume leurs Images :
Eux-même avec candeur se disant immortels,
De leurs mains tour-à-tour se dressent des autels :
Sous peine d’être un sot, nul plaisant téméraire .
Ne rit de nos amis & fur-tout de Voltaire.
On auroit beau montrer ses vers tournés fans art,
D’une moitié de rime habillés au hasard,
Seuls, & jettes par ligne exactement pareille, «
De leur chute uniforme importunant Poreille,
Ou, bouffis de grands mots qui se choquent entr’eiix S
L’un sur l’autre appuyés, se traînant deux à deux ;
Et sa prose frivole, en pointes aiguisée^.
Pour braver Fharmonie, incessamment brisée:
Sa prose, sans mentir, & ses vers font parfaits ;
Le Mercure trente ans Fa jure par extraits :
Qui pourrait en douter? Moi! cependant j’avoue
Que d’un rare savoir à bon droit on le loue ;
Que ses chefs-d’oeuvres faux, trompeuses nouveautés r
Etonnent quelquefois par d’antiques beautés ;
Que par ses défauts même il fait encor séduire :
Talent qui peut absoudre un siècle qui Padmire.