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AVÈNEMENT DU ROMAN FEUILLETON

auteur de la trop célèbre Mlle Giraud, ma femme ; et enfin, le grand favori des concierges et des ouvreuses, M. de Montépin, qui représente de façon typique le roman-feuilleton jusqu’en ces dernières années : Sa Majesté le roi du monde, le Mari de Marguerite, etc., sont dans tous les offices et dans toutes les loges.

Il convient, disais-je plus haut, de mettre à part Gustave Aimard, G. Ferry, de la Landelle, peintres colorés de la vie américaine. Les imitations de Cooper, que publia G. Ferry, les Trappeurs et les Aventuriers de G. Aimard sont pleins de verve. Quant à M. de la Landelle, il se fit une grande réputation dans le roman maritime. Il a bien vu les mœurs des matelots. Il a compris leur âme, analysé leurs sentiments, étudié leurs joies et leurs tristesses. Il a mis en scène leurs passions et même leurs vices, et il a chanté la grandiose poésie de la mer. La Gorgone et une foule d’autres romans du même genre, atteignent de remarquables effets dramatiques.

On aime à rappeler ces noms à côté de ceux de tant d’écrivains qui abusèrent de leur facilité et de leur talent, dans un but de spéculation, pour flatter, tromper, dépraver les intelligences inférieures. Le roman-feuilleton a été un des pires agents de la décomposition littéraire au xixe siècle. Son œuvre démoralisatrice n’est balancée par aucune tendance esthétique. Il est le père de ces romans pornographiques et imbéciles, répandus à foison dans le peuple, et dont les