Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/248

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Des lis roses, des lis faits de chairs amoureuses,
Tels qu’une joue en feu sous le feu des baisers,
Ouvrent pudiquement leurs corolles heureuses
À l’insecte qui boit leurs parfums framboises.

Mais ni le clair babil de l’onde ni l’abeille
Bourdonnant dans l’air tiède où la brise a frémi,
Ni les parfums ni la lumière, rien n’éveille
Le bel Hermaphrodite en son rêve endormi.

Doux être, éveille-toi ! Soulève tes paupières !
Tourne-toi vers l’amour qui s’approche de toi !
Pour tes charmes l’amour enflammerait les pierres,
Pour ton amour l’amour oubliera toute loi.

L’amour ? Ah ! deux amours luttent dans ta poitrine
Chaque fois que ton souffle en gonfle la beauté ;
Mais, tout en combattant, dans leur ardeur divine
Ils s’embrassent l’un l’autre, ivres de volupté.

Quel prodige a fondu dans ta double nature
La force féminine et la mâle douceur ?
Lorsque le blond soleil baise ta chevelure,
Apollon te prend-il pour son frère ou sa sœur ?