Page:Gilkin - La Nuit, 1897.djvu/98

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Épanouis parmi les suaves pétales,
Si tristes et si doux, les chers visages pâles
Laissent parfois couler l’eau vive de leurs pleurs.
Et quand la brise passe, alors toutes les fleurs
Gémissent, et quels longs murmures, quelles plaintes,
Quels sanglots et quels cris vers les étoiles saintes !

C’est l’arbre de la vie, où croissent les douleurs,
L’arbre dont chaque fleur qui s’ouvre est un supplice.
Du fond rouge et meurtri de leur morne calice,
Vase de chair, béant, palpitant et sanglant,
La souffrance jaillit comme un parfum troublant,
Un parfum capiteux aux puissantes ivresses,
Qui berce les cerveaux en d’étranges caresses,
Pleines de charité, pleines de cruauté,
Où la mort se marie avec la volupté.

Sur la cime de l’arbre, en des cieux de vertige,
Dans la plus triste fleur qui saigne sur sa tige,
Rayonne un frêle enfant, divinement vêtu
De neige lumineuse. Ô mon cœur, le vois-tu ?
C’est le suprême enfant de la douleur du monde.

Que promet son sourire en sa pitié profonde ?
Au fond de la souffrance, ah ! pourrons-nous jamais
Trouver l’amour céleste et l’éternelle paix !