Page:Gill - Le Cap Éternité, 1919.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Pour traîner son bluet déployant du génie,
Inclinait un brin d’herbe en travers d’un gravier,
Et le fardeau roulant cédait à ce levier...
Les choses s’endormaient dans leur paix infinie.
Pendant que le soleil mourait splendidement
J’ai drapé mon néant dans mon âme immortelle,
Et j’ai dit au soleil : ― Éblouissement d’or,
Autant que ta splendeur une pensée est belle !
Par delà ton éclat plane son fier essor ;
Et ton scintillement, dans la nuit froide et noire,
Pénètre moins loin qu’elle au fond de l’avenir,
Car tes feux pâliront avant le souvenir
Que mon âme éblouie emporte de ta gloire !
Et j’ai dit au Rocher : ― Devant toi j’ai frémi ;
Mais le regard divin contemple en paix ta pierre,
Et ton dôme effrayant, vu de l’ultime sphère,
Ne paraît pas plus haut que cette humble fourmi !
.......................................................
.......................................................

J’avais vu le fronton se parer de l’aurore
Avant qu’elle eût brillé sur les monts d’alentour ;
Aux rayons du couchant, je revoyais encore,
Sur le même granit se prolonger le jour.
Moment prodigieux ! les heures trop rapides,
Dans leur fuite éternelle ont paru ralentir ;
Et le soleil mourant, avant de s’engloutir,
Par delà le grand mur lointain des Laurentides,
Déposa sur la cime un baiser lumineux ;
La pierre rutilait, couverte de topaze,
Et les vieux pins royaux se dressaient en extase
Dans l’éblouissement de ces divins adieux !
......................................................
......................................................