Page:Gill - Le Cap Éternité, 1919.djvu/37

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Au charme évocateur et magique des sons,
Un peuple mort s’est réveillé dans ma pensée ;
Mon cœur a pris le deuil de sa gloire passée,
Que par notre silence ingrat nous offensons.

La cloche fit chanter l’écho des murs antiques ;
Et les chœurs endormis depuis le temps jadis,
Fervents ainsi qu’aux jours des nobles fleurs de lys,
Dans l’église déserte ont redit leurs cantiques.

Je t’évoquais, cloche des deuils et des adieux.
Et cloche des fiertés joyeusement sonore,
Saluant par ton chant virginal dans l’aurore,
Le chef Tacouérima toujours victorieux !

Je t’entendais frémir d’allégresse au baptême,
Saluer le secret profond de l’Ostensoir,
Convier les croyants à l’oraison du soir.
Et sur les trépassés gémir l’adieu suprême.

Je t’évoquais, sonnant bien loin dans l’Autrefois,
Pour le retour du brave à la plage natale,
Pour le pêcheur perdu dans la brume automnale,
Et qui revient au port, appelé par ta voix.

Je revoyais aussi les sveltes sauvagesses,
Au frôlement silencieux de leurs souliers
S’avancer vers l’autel avec les fiers guerriers,
En inclinant leur front orné de noires tresses.

Je t’entendais encor, dominant tout le bruit
De la bourgade en feu, quand ton bronze tragique,
Parmi les hurlements de la folle panique,
Jeta les sons affreux du tocsin dans la nuit.