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qui peut dire, s’il y eût touché, ce qu’en aurait fait un Rubens ?


III


Ainsi allaient les confréries, avec leur mélange d’abstraction et de réalisme, d’analyse et de sentiment, enrichissant, renouvelant, finissant presque par transformer la dévotion à Jésus-Christ : on pressent déjà le Sacré-Cœur et Paray-le-Monial.

Comment ont-elles agi sur le culte des saints ? Je ne puis qu’effleurer la matière, qui est très vaste, copieuse, pittoresque, abondante[1]. Qu’il suffise de dire en deux mots que, dans le culte qu’elles rendaient à leurs saints, et dans l’idée qu’elles s’en formaient, les confréries ont obéi à un double mouvement : le patron était, d’une part, un modèle dont on avait à se rapprocher, mais de l’autre, pour rendre l’imitation plus facile, on commençait déjà par le rapprocher de soi. Pour être plus sûrs de lui ressembler, on le façonnait à notre ressemblance. Les boulangers se figuraient que leur saint Honoré, avait été geindre quelque part dans sa jeunesse. Pour les orfèvres, saint Eloi devenait un ancien maréchal ferrant. Les charpentiers de Marseille faisaient de saint Joseph un constructeur de barques, comme si Nazareth était un port de mer[2] ; tandis que la Flandre, pays de grains et de moulins, se le représente comme un fabricant de souricières[3].

  1. Cf. Mâle, loc. cit., liv. I, ch. iv : Les aspects nouveaux du culte des saints, p. 156-205.
  2. Tableau commandé en 1520 au peintre Peson. Bullet. archéolog. de la Commission, 1885, p. 378.
  3. Triptyque de l’hôtel de Mérode.