Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/380

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

courage, ce fatras haineux d’Henri Estienne, l’Apologie pour Hérodote : ce sont les Mendiants qui en font tous les frais. Ce que l’auteur exècre, c’est le tour d’esprit même de cette religion populaire, ce qu’elle comporte forcément de matériel et de forain ; c’est la liberté audacieuse de cette sainte canaille, sa familiarité turbulente avec le divin ; c’est cette piété irrationnelle et imaginative, qui collabore à l’Évangile, s’y intéresse de tout son cœur, et ne se croit pas défendu d’y ajouter du sien. Et il faut le comprendre : rien ne pouvait être plus impie aux yeux d’une religion juridique, qui arrêtait la foi au texte, et pour laquelle la vérité est durcie dans la lettre.

Ainsi les Mendiants déconsidérés, conspués par les humanistes et par les huguenots, sifflés par les bourgeois, abandonnés par le clergé, paraissent déchus sur toute la ligne de la situation magnifique qu’ils avaient occupée pendant trois siècles dans l’Église. Après 1550, ils perdent un terrain immense. Signe que leur grande période créatrice se termine : les historiens, les annalistes succèdent aux mystiques et aux théologiens ; c’est l’heure des érudits et des bibliographes[1]. Sans doute, les

    cules attaques. M. Paul Sabatier en a fait noblement justice. « Nulle part, écrit-il, Barthélemy de Pise ne fait de saint François l’égal de Jésus, et il lui arrive même de prévenir la critique à cet égard. » (Vie de saint François, 39e édit., p. 115). Mais on ne saurait lui accorder que ces querelles de théologiens n’ont point d’importance pour l’histoire ; au contraire, le point de vue de l’Alcoran est demeuré, jusqu’au milieu du xixe siècle, celui de toute la critique et du rationalisme protestant et encyclopédiste. Voir la note, p. 8 et 9, cf. Walch, Bibl. theologica, Iéna, 1757, t. II, 429-468 ; Wadding, Scriptores Minorum, Rome, 1650, p. 48, et Annal. Minor., 2e édit., t. IX, p. 152 ; Tiraboschi, Storia della Liiteratura italiana, Florence, 1805, t. V, p. 144 ; Vacant et Mangenot, Dict. de Théologie catholique, aux mots Alber et Albizzi.

  1. Léandre Alberti, De viris illustribus ordinis praedicatorum, Bologne, 1517 ; Gonzaga, De origine seraphicae religionis franciscanae, Rome, 1587 ; Rapine, Histoire générale de l’origine et progrès des Frères Mineurs de saint François. Paris, 1630 ; Wadding, Annales Minorum. t. I-VIII, Rome, 1628-1654 ; Scriptores Minorum, Rome, 1650 ; D. de Gubernatis, Orbis