Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/72

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de l’autre un S. Domenico, chacun à son extrémité de la ville, pour se partager la tâche et ne pas trop se faire concurrence. Une fois ce chemin reconnu, vous êtes orienté : vous avez dans la tête le plan de la ville ancienne et les grandes lignes de sa vie.

Les frères se mettent à bâtir. Il est clair que dans chaque endroit les choses vont dépendre des ressources du pays. En général, tout le monde y va de tout son cœur : personne ne refuse à Dieu et aux Frati. À Reggio, en 1233, pour l’église des Prêcheurs, toute la ville s’attelle à la construction. La ferveur est extraordinaire. « C’était à qui viendrait, hommes et femmes, petits et grands, chevaliers ou soldats, bourgeois ou paysans, à qui porterait des pierres, du sable, de la chaux sur son dos, dans des sacs ou des outres de toutes sortes. Et bien heureux celui qui en pouvait porter le plus ! » À Venise, pour les Frari, même émulation, seulement sur une plus grande échelle : un Anguiè donne un pilier, un Giustiniani en donne deux, un Gradenigo en donne quatre. Le condottiere Savello paye les frais des voûtes. Un Viara donne 16.000 ducats pour ériger la tour. À Florence, pour la reconstruction de Sainte-Marie-Nouvelle, la Ville en trois ans vote deux fois 1200 florins d’or ; l’année d’après, mille florins, 500 pour les remparts et 500 pour l’église : les deux allaient de pair, la défense et la piété, comme également nationales et pareillement patriotiques.

Le principe est de faire, pour la somme dont on dispose, aussi grand, aussi vite et aussi simple que possible. On ne raffine pas, on ne va pas chercher midi à quatorze heures. « C’étaient, écrit Ruskin, des églises faites pour le service, pas du tout par ostentation, par amour-propre d’auteur ou par vanité de clocher. Des églises où prêcher, où prier, où célébrer, où enterrer, rien de plus :