Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/74

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Padoue est le classique du genre. — Enfin la famille lombarde, la moins belle de toutes, un peu bâtarde et amorphe : une église comme celle de Saint-François à Crémone, avec ses quatorze travées (Notre-Dame n’en a que huit) donne vraiment l’impression d’une chose inarticulée, traînante, interminable.

Il y a d’ailleurs beaucoup de types intermédiaires, mais l’essentiel est là. Les caractères saillants restent partout les mêmes : dimensions spacieuses, absence de décoration sculptée, grande impression de calme et de vide. Pourquoi le nier ? On voit bien qu’une architecture de ce genre n’a presque plus rien de gothique. Elle n’en conserve que l’apparence et les formes les plus extérieures ; tout ce qui constitue la vie intime de ce style, son sens et sa logique profonde, se dissipe, s’évanouit. De toutes les églises des Mendiants, je ne vois guère que Saint-François de Bologne où le système gothique soit appliqué correctement, sans chaleur ni génie, mais par un élève consciencieux. La basilique d’Assise est la seule où le faisceau de colonnes présente quelque pureté, et où les chapiteaux soient d’un travail soigné. Dans la plupart des cas, c’est l’âme même du gothique qui a été sacrifiée. La valeur de cet art réside dans la structure complexe, dans la subordination des parties, dans la nécessité qui lie tout l’organisme, de la façade au chevet et de l’arc-boutant au pinacle, dans un jeu de forces et de poussées, de charges et de résistances d’où résultent la forme et la nature de tout le détail. Eh bien ! il faut le reconnaître : l’Italie n’y a rien compris. Elle n’en retient que les éléments les plus superficiels. Presque toujours, elle en limite l’usage à la forme mitrée des portes et des fenêtres. Son gothique est un contresens perpétuel, une méconnaissance continue du gothique.