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APRÈS LES LABOURS


À M. Alfred Descarries,

Au peintre et poète.


L’heure solaire a fui : le calme règne aux champs.
Des outils sont restés appuyés aux clôtures.
Dans le lointain, l’on voit défiler des voitures
Par les chemins ombreux pleins de nids et de chants.

Dans les sillons nouveaux, de craintives corneilles,
Sans relâche, aux aguets, becquettent le bon grain.
D’un val monte dans l’air la voix du grave airain ;
Au rûcher bourdonnant reviennent les abeilles.

Accélérant leur marche en l’obscur incertain,
Des cavales s’en vont vers le proche village
D’où, seul, un vieux clocher émergeant du feuillage,
Dessine son profil sur l’horizon lointain.

En traversant le pont d’un cours d’eau qui sommeille,
Le pas lourd du bétail résonne dans la nuit ;
On entend le plongeon d’une loutre, à ce bruit
Que l’onde répercute ; et le ruisseau s’éveille.

Connaissant par instinct le moment du retour,
Les bœufs lèvent la tête et meuglent vers l’étable
Où, dans la paix du soir, à quelque écho semblable,
D’autres voix à leur voix répondent tour à tour.