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POÈME CHAMPÊTRE


À Monsieur Jean Charbonneau,
au délicat poète.


Sur les monts alignés comme une caravane,
Le soleil en sa gloire émerge à l’horizon.
Le ciel semble or et sang. Du fond de la savane
Un roitelet pieux entonne une oraison.

Dans la paix du matin, l’alouette, au rivage,
Fait son nid en chantant ses refrains coutumiers
Sur le miroir des eaux se mire un lis sauvage ;
Un jardin jette au vent des senteurs de pommiers.

Des étangs, des fossés, et des mares boueuses,
Avec le jour naissant s’éteint soudain le bruit
Monotone que font les grenouilles peureuses
Dès l’aube pourchassant les ombres de la nuit.

La ferme se reprend doucement à la vie.
Au loin, dans les pâtis des troupeaux vont meuglants.
Sur les toits, les pigeons roucoulent à l’envie.
Aux prés, les moissonneurs cheminent à pas lents.

Et par la route où traîne ainsi que des fantômes,
Du brouillard matinal les blancs langes soyeux,
Sur le fond verdoyant du frais gazon, les hommes
Voient l’ombre de leurs corps s’allonger devant eux.