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Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/153

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PINDARE

couleur, presque toute la pièce intitulée la Bataille perdue :

Allah ! qui me rendra ma redoutable armée ?
La voilà par les champs tout entière semée,
Comme l’or d’un prodigue épars sur le pavé.
Quoi ! chevaux, cavaliers arabes et tartares,
Leurs turbans, leur galop, leurs drapeaux, leurs fanfares,
C’est comme si j’avais rêvé !

Et plus loin :

Les noirs linceuls des nuits sur l’horizon se posent.

Dans la même gamme assombrie et calme, rappelez-vous ailleurs cette personnification pittoresque et vivante d’une ville espagnole :

Toujours prête au combat, la sombre Pampelune,
Avant de s’endormir aux rayons de la lune,
Ferme sa ceinture de tours.

Ou bien cette image de la nuée portant le feu du ciel :

On croit voir à la fois, sur le vent de la nuit,
Fuir toute la fumée ardente et tout le bruit
De l’embrasement d’une ville.

Quand, au milieu de la torpeur classique de la Restauration, résonnèrent ces admirables vers, on sentit qu’une nouvelle poésie était née chez nous. Relevons seulement encore, pour nous rattacher plus étroitement à notre sujet, un emploi hardi des épithètes, conforme au désir de Ronsard et à la