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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

est ici encore la tendance générale de l’art grec : il cherche la sérénité. L’art moderne, au contraire, surtout chez le représentant illustre qui nous a paru rappeler quelques côtés de Pindare, a souvent pour but dernier l’étonnement, l’effet, et réserve pour la fin son principal effort.

Faut-il se borner à constater ces différences, ou bien peut-il naître de là quelques réflexions qui intéressent l’avenir de notre poésie lyrique ? Doit-on s’en tenir à ces formes créées ou renouvelées par les maîtres contemporains, ou bien serait-il possible, dans le champ infini de l’art, d’innover encore ? Serait-il défendu à un génie puissant de briser les moules adoptés et de secouer le joug monotone des procédés, soit pour donner au vers libre, dans l’expression des idées élevées et de la passion, la valeur qu’il a su prendre dans la poésie familière de La Fontaine, soit même pour inventer des dessins de strophe plus amples et plus souples ? Est-ce un simple rêve, auquel se refusent les lois qui déterminent la constitution musicale de notre poésie, et doit-on se contenter de souhaiter la venue d’un poète qui sache faire du nouveau avec les formes existantes ? Nous soumettons ces questions aux habiles ouvriers qui ne cessent de travailler chez nous le rythme et tout le matériel de la science poétique. Quant à nous, qui ne prétendons rien décider, nous affirmerons seulement, pour