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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

tradition à la fois mythologique et littéraire, qui a rattaché le chant pastoral au dieu arcadien de la syrinx et des troupeaux, à Pan, particulièrement honoré sur le Ménale. Cette tradition était établie dès le temps de Virgile ; elle le fut peut-être par lui. Dans une de ses églogues, il met en scène deux enfants arcadiens et il appelle le chant bucolique Mænalios versus. En tout cas, elle ne paraît pas remonter jusqu’à Théocrite.

« La Sicile aux nombreux troupeaux », a dit Pindare. Sa richesse en ce genre était aussi célèbre chez les anciens que la fertilité de ses plaines. En outre, de fraîches et poétiques vallées s’ouvraient dans les contreforts de la grande montagne de l’Etna. On conçoit donc qu’elle ait réalisé mieux que tout autre pays cet idéal de vie pastorale que l’antiquité s’est figuré avant nous, celui dont Lucrèce nous présente la charmante image. On se rappelle ces jolis traits : les bergers, élèves des oiseaux et des zéphyrs qui sifflent dans les tiges des roseaux, inventant les douces plaintes de la flûte dans les forêts profondes, au milieu des gorges des montagnes, dans des solitudes aimées et des loisirs divins,

Per loca pastorum deserta atque otia dia.

Ce vers ravissant remplace presque la gracieuse mythologie dont le poète philosophe ne veut plus.

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