Aller au contenu

Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/240

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
226
ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

On l’a souvent cité, et c’est peut-être le souvenir plus ou moins net du trait si expressif otia dia qui a inspiré à Fontenelle la moitié vraie de cette théorie qui fait consister l’églogue dans « la conciliation des deux passions les plus fortes de l’homme, la paresse et l’amour. » Il n’a pas tort de dire, dans son langage peu poétique, que la vie pastorale, la plus paresseuse de toutes, convient le mieux à l’églogue. Les bergers, dans le calme de la nature, avaient le loisir d’en sentir la pénétrante influence ; ils étaient sollicités à la rêverie et à un certain mouvement d’imagination ; leurs mains libres pouvaient tenir la flûte, et elles le firent de très bonne heure, car Homère nous montre déjà deux bergers se charmant eux-mêmes avec leurs syrinx, pendant qu’ils suivent leurs troupeaux de bœufs et de moutons. C’est en Sicile que cette habitude naturelle prit la forme la plus déterminée, en même temps que naquirent et se formèrent des légendes pastorales d’un admirable caractère.

On raconte que, dans les villes de Tyndaris et de Syracuse, se développa une coutume liée au culte dorien, peut-être d’origine lacédémonienne, d’Artémis Fakélitis. Pendant la fête de la déesse, les bergers, venus de la plaine ou de la montagne, engageaient sous son patronage des luttes poétiques. On ajoute qu’ils se formaient en troupes, sous le nom de bucolistes, et qu’ils s’en allaient par la