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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

Sicile, et même l’Italie méridionale, répandre leurs chansons pour gagner renom et profit. Voilà l’origine populaire du chant bucolique, du bucoliasme, qui emprunte son nom aux bouviers, les plus riches et les premiers parmi les pasteurs. Diodore nous dit que de son temps cet usage existait encore et qu’il était toujours en faveur. En quoi consistaient ces chansons de bergers ? qu’était-ce que le talent des artistes, musiciens, chanteurs ou poètes ? quel était le rôle de la mémoire et celui de l’improvisation ? Il n’y a guère à chercher de réponses précises. Tout ce qu’on peut dire, c’est que sans doute la science naïve des pasteurs siciliens, tout en se perfectionnant par une longue pratique et tout en admettant une certaine variété, resta fidèle à des procédés et à des habitudes qui lui servaient comme de soutiens et la dispensaient de grands efforts d’invention. Un rythme facile fournissait aux idées, simples et courtes, un moule commode. Le vers intercalaire, d’origine sicilienne, nous dit-on, et né de la poésie populaire, ménageait des repos et, par le refrain qu’il formait, coupait le chant en petites strophes. Dans les couplets alternés, où un chanteur était tenu d’imiter l’autre par l’analogie des idées, des images, du tour et du rythme, cette loi de correspondance ne constituait pas seulement une difficulté à vaincre : les improvisateurs rivaux trouvaient aussi un secours dans ces