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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

Galatée dans le monde de la poésie et de l’art. Ils y eurent désormais leur place. Aussi figuraient-ils dans les galeries amoureuses des auteurs alexandrins, qui les transmirent à Ovide et à Lucien[1] parmi les sujets les plus favorables au merveilleux galant. Mais auparavant Théocrite y imprima sa marque particulière.

Ce qui me frappe d’abord en lui, c’est qu’il paraît seul avoir repris et traduit sous une forme gracieuse l’idée première de la légende sicilienne. Dans le mythe marin, j’ai dit comment les Cyclopes semblaient s’être séparés de leur élément originel pour se fixer parmi les rochers du rivage. La néréide Galatée est aussi une enfant et une personnification de la mer ; mais ce qu’elle représente, ce n’est point, comme les Cyclopes, le trouble furieux, c’est, au contraire, ainsi que l’exprime son nom, le calme, la douce et lumineuse sérénité des flots ; et, loin de s’en séparer, elle y reste attachée comme un élément persistant de grâce et d’attrait. Lors donc que Polyphême se sent attiré vers Galatée, c’est la mer, la mer qu’il a quittée pour ne plus y revenir, qui l’invite sous son plus séduisant aspect, et il ne peut détacher d’elle ni ses yeux ni ses désirs impuissants. Elle irrite sa passion et ne la satisfait jamais. Ainsi sur le rivage

  1. Dial. mar., I.