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Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/302

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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

lumière. Il a de merveilleux troupeaux comme le soleil ; — on sait que les vaches du soleil sont les nuages. — Parmi les noms divers que les traditions donnent à sa maîtresse, on rencontre celui de Lyké (la lumineuse) : il aime donc passionnément la lumière et il meurt quand elle le quitte. « Daphnis, dit M. Decharme[1], adoptant en partie les idées de M. Cox, c’est sans doute le beau soleil, qui chaque jour fait paître ses brillants troupeaux, qui au matin de sa vie aime l’Aurore et en est aimé, qui plus tard s’éloigne d’elle, qui pour prix de son infidélité est aveuglé par la nuit et disparaît bientôt derrière les hautes cimes. » Voilà une très ingénieuse explication de la légende tout entière, y compris la mort du berger aveugle et sa chute dans un précipice. Sans oser aller jusque-là et sans prétendre nier plus qu’affirmer, car, en ces matières, l’un est presque aussi difficile que l’autre, remarquons que, dans cette interprétation, le moment pathétique, celui de la disparition de la lumière avec le sentiment de tristesse qu’elle amène, répond précisément au sujet choisi par Théocrite dans sa viie idylle : le désespoir de Daphnis cherchant sa bien-aimée. Seulement empressons-nous d’ajouter que cet ordre d’explications, antérieur à tout développement concret et

  1. Mythologie de la Grèce antique, p. 461.