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LA PASTORALE DANS THÉOCRITE

à une variante connue de la légende, mais cela importe peu. Daphnis amoureux souffre, et avec lui souffrent les chênes de l’Himère : voilà le thème pastoral. Il faut s’en tenir là et se garder de toute autre interprétation.

Au contraire, dans la ire idylle, on ne peut pas se dispenser d’interpréter. Ce n’est plus, en effet, une simple esquisse ; c’est une composition développée, c’est un tableau dont les traits sont déterminés par un choix d’idées que le poète n’exprime pas directement, qu’il ne révèle que par les effets visibles. Il faut donc essayer de discerner cette pensée intime dont tout dépend, détails et ensemble. On reconnaîtra, si je ne me trompe, que cette œuvre, d’un art ingénieux et savant, vaut surtout par la grandeur relative d’une conception qui remonte franchement à l’idée élémentaire de la légende.

Cette idée élémentaire, quelle est-elle ? Si l’on en croit les mythologues de l’école de M. Max Müller, qui, à son exemple, voient dans les différents mythes des races aryennes les formes diverses dont l’imagination des peuples a revêtu un fonds commun, les phénomènes célestes de la lumière et les vives impressions qu’ils ont primitivement produites, Daphnis est d’origine solaire comme d’autres dieux ou héros pasteurs. C’est mythologiquement un frère de Daphné, aimée du dieu de la