Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
43
ÉPICHARME

gues. Ici c’est surtout la peinture d’une prodigieuse voracité :

« D’abord, si tu le voyais manger, tu en mourrais. Son gosier gronde, ses mâchoires craquent, ses molaires résonnent, ses canines grincent ; il siffle des narines, il agite les oreilles. »

Cette description nous transporte en pleine charge populaire ; elle ne dut pas déplaire aux délicats. Les Grecs seront toujours prêts à rire de la gloutonnerie d’Hercule ; les spectateurs d’Euripide prendront plaisir à le voir manger et boire de bon cœur dans la maison d’Admète tout en deuil, avant d’aller arracher Alceste au génie de la mort. Dans Épicharme, qui présentait sous de pareils traits le vainqueur de Busiris, la partie la plus raffinée du public admirait cet art nouveau, qui relevait le grotesque par une recherche expressive de mots et d’harmonies et le revêtait pour la première fois du mètre poétique.

La place réservée aux plaisirs de la table dans le théâtre du comique syracusain s’explique d’abord par le rapport qu’avait un pareil sujet avec le Cômos bachique, une des principales sources de la comédie. C’était, en outre, une conséquence des mœurs siciliennes. Les Doriens de la Sicile et de l’Italie ressemblaient peu aux Doriens de Sparte. Déjà dans la Mégare de Grèce, enrichie par le commerce et énervée par le luxe, les banquets doriens