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ÉPICHARME

être surtout la déchéance rapide de Syracuse, tout occupée de discordes, épuisée par les guerres civiles et extérieures ; peut-être la mollesse et la mobilité des Syracusains, plus avides de plaisirs sans cesse renouvelés que capables d’encourager les efforts soutenus dans l’invention des œuvres d’art, et bien vite tombés, sous l’influence du climat, au rang des cités commerçantes de l’Asie Mineure, les empêchaient de produire des poètes. Les confréries ambulantes d’artistes dramatiques suffirent à leur goût pour les spectacles ; et ils semblent même à cet égard être restés inférieurs aux Tarentins, qui, à défaut d’un Ménandre, eurent Rhinton et ses imitateurs avec leurs tragi-comédies.

Voilà les raisons historiques. Quant aux raisons d’art, il n’en existe aucune. Les œuvres d’Épicharme avaient en elles-mêmes une incontestable valeur. Il se peut qu’Otfried Muller ait pris trop au sérieux un mot de Platon qui, en se jouant et pour le besoin de sa cause, fait du poète sicilien le premier des comiques[1] ; mais il ne faut pas non plus trop déprécier ce qui a pu donner lieu à cette exagération. Non, l’invention d’Épicharme n’a pas péri : elle a été conservée et achevée par les Attiques, d’abord pendant la période de la comédie

  1. Théét., 152, e-d.