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Les pauvres, enveloppés dans de mauvaises couvertures, s’étaient pelotonnés frileusement comme des oiseaux de neige contre le sein de la jeune fille pour réchauffer du mieux possible leurs membres engourdis par le froid.

Ils dormaient.

Leurs boucles blondes se mariaient délicieusement avec les tresses noires de la grande sœur tranchant avec grâce sur la naissance du cou immaculé.

Elle s’était levée en sursaut.

Marius alors, muet d’étonnement, put contempler dans toute sa splendeur cette fleur exquise et modeste, cachée dans ce refuge comme le nénuphar dans un étang solitaire.

Leroux, indifférent à ce qui l’entourait, s’était écroulé sur un grabat, dans un coin, en balbutiant :

— À bas la canaille !… Qu’on nous éventre les capitalistes !… Pour les pauvres, pas de feu, pas de pain… pas d’étrennes !…

— Je vous prie d’excuser ma présence chez vous, dit enfin Marius, son chapeau à la main. Cet homme, votre père, si je ne me trompe, a glissé sur le pavé. Alors, comme il ne pouvait plus marcher que difficilement, j’ai pris sur moi de le reconduire chez lui.

Intimidée, la jeune fille ne trouva rien à répondre.

Marcelle — c’était son nom — était debout, ayant de chaque côté d’elle les bambins ses bras passés autour de leur cou.