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Page:Girard - Contes de chez nous, 1912.djvu/169

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s’était arrêté chez elle une couple de fois, par galanterie, elle se crut assurée du succès.

Elle s’aperçut bientôt du contraire.

En effet, le jeune homme, ayant appris que Toinette faisait courir le bruit qu’il s’était épris de ses charmes, ne remit plus les pieds chez la jeune fille.

Pleine de dépit et de confusion, la coquette dit, sous le sceau du secret à une amie, sûre que, le lendemain, tout le village le saurait, que les visites de Julien l’importunaient.

Non satisfaite, elle jura de se venger à la première occasion favorable.

Cette occasion ne devait pas tarder.

***

Rosalyne suivait à pas lents le chemin de Saint-Damien, instinctivement attirée vers cette grande roche plate où Julien lui avait demandé de devenir sa femme. Jamais le ciel n’avait été si bleu, le feuillage si vert, le lac si brillant. Il lui prenait des envies folles d’unir sa voix à celle des petits chantres de Dieu qui ramageaient dans l’épaisseur des bois. Ah ! si Julien avait été témoin de la joie délirante de celle à qui il avait demandé d’être sienne pour l’éternité, alors il eût compris que trop souvent ce qu’il prenait pour de la froideur chez Rosalyne n’était que de la réserve que seule affermissait la volonté guidée par la pudeur.

Sa femme !… À cette pensée, elle joignait les mains,