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ans, des échappées de jeunesse, et ses lèvres minces et pâles ensoleillées par un éternel sourire de bonté !

J’étais un favori dans la maison de briques rouges de la rue des Forges, d’où le maître, hélas ! était parti depuis des années.

Deux fois la semaine, le jeudi et le dimanche, me soulevant sur la pointe des pieds, je laissais retomber le marteau de fer forgé — une tête de lion à la crinière hérissée qui montrait des crocs formidables. Le plus souvent, c’était la vieille servante, Angélique, qui venait m’ouvrir. Quelquefois, cependant, ma tante, en personne, me faisait l’honneur de m’introduire dans le calme intérieur. À mon entrée, elle m’appliquait un bon gros bec sur les deux joues, puis s’informait de ma santé, de mes succès à l’école. Cela fait, elle me poussait une chaise près de la longue table ovale de la salle à manger. Ce geste faisait mon bonheur : les confitures, les gâteaux et la crème n’étaient pas loin. Ah ! les délicieuses confitures, les succulents gâteaux de ma tante Joséphine, ils sont inséparables du souvenir de la chère disparue.

Mais, je m’écarte de mon sujet.

Au nombre des objets qui m’étaient familiers mais dont quelques-uns avaient longtemps intrigué ma curiosité, il me faut mentionner un fer à cheval, fer banal, tout rouillé, comme il nous arrive d’en trouver sur notre route.

Celui dont je veux parler occupait la place d’honneur du salon, sur une console de marbre. Il était cou-