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Page:Girard - Contes de chez nous, 1912.djvu/186

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que j’ai failli me faire assommer en pleine rue, et par votre fille encore ?

Les deux hommes bouillaient, les voix avaient des éclats sonores dans la tranquillité du soir, les piétons s’arrêtaient, faisaient cercle. Là-bas, un gardien de la paix s’amenait d’un pas lent et majestueux.

Attirée par le bruit de ce tapage insolite, la jeune fille parut au haut de l’escalier.

— Papa, dit-elle, fais donc monter M. Bournival ; je vais t’expliquer.

Autant pour échapper aux lazzi des curieux que pour obtenir des éclaircissements sur cette affaire, le père se rendit à la demande de sa fille.

Ma tante, qui se savait seule responsable de cette mauvaise aventure, voulut se faire pardonner. Aussi se montra-t-elle des plus aimable. Elle avait séché ses larmes et un sourire plein d’aménité arquait gentiment ses lèvres. C’était le soleil après la pluie.

Elle prit elle-même le chapeau et la canne des mains de M. Bournival, et le pria de daigner prendre le fauteuil qu’elle lui avança.

Comment tant de grâce et d’empressement n’auraient-ils pas désarmé le plus intraitable ?

Ce fut donc d’un ton radouci que le jeune homme commença :

— Je venais de quitter un ami et traversais la rue, quand tout à coup…

— Inutile de continuer, interrompit ma tante. J’ai d’humbles excuses à présenter à M. Bournival, et j’es-