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Page:Girard - Contes de chez nous, 1912.djvu/30

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Là-bas, on découvre le Metaberoutin, ou fleuve des Trois-Rivières, que ne sillonne aucune embarcation à cette heure de la nuit. Pas le moindre nuage ne tache la nappe limpide et resplendissante de l’immensité saupoudrée de millions d’étoiles.

Le camp des Agniehronnons sommeille sous la garde de deux sentinelles. Comme la lune inonde les bois et les eaux de sa lumière calme, et qu’il faut agir en toute prudence, on n’a pas allumé de feu.

Cependant, outre les deux sentinelles placées à chaque extrémité du camp endormi, un homme veille.

Cet homme est Aontarisati.

Debout, droit, les bras croisés sur sa large poitrine traversée de colliers de porcelaine, immobile, Aontarisati se tient sur la pointe avancée d’un roc dans lequel il paraît sculpté.

Ses yeux sont perdus dans l’infini.

À quoi songe l’Indien, en cette nuit éblouissante de sauvage grandeur ? Pourquoi ne partage-t-il pas le repos de ses frères d’armes ?

L’Iroquois aime.

Nénuphar-du-Lac, fille de Kiotsaeton, lui a pris son cœur.

Inutilement dans vingt combats sanglants il a montré sa valeur indomptable ; vainement à sa ceinture pendent les chevelures de nombreux ennemis ; sans succès il a promis au sagamo, pour la main de sa fille, des chiens, des castors, des chaudrons et des haches.

Kiotsaeton n’a pas encore donné son assentiment.