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VII


Le camp est plongé dans le sommeil.

Près d’une hutte en écorces de bouleau recouverte de roseaux tressés en nattes, Andioura veille à la lumière d’un feu qu’il semble ne pas vouloir ranimer.

Assis, les jambes croisées, il fume son petunoir dans une impassibilité feinte, car, sous son crâne gronde toute une tempête de pensées.

De temps à autre, il jette sur les huttes endormies des regards anxieux.

À quelques pas de là sont attachés les deux captifs.

Le missionnaire a obtenu de son gardien de lui détacher un bras. Il lit son bréviaire, le front serein, comme s’il eût été dans un oratoire, et non lié au milieu de ces Indiens qui lui feront subir d’horribles tortures.

M. de Champflour dort paisiblement.

L’aboiement de quelque chien ou le hurlement de quelque fauve troublent seuls la paix enveloppante de cette nuit pure et calme qui précède la scène sanglante dont sera témoin l’aurore.

Que se passe-t-il dans l’esprit d’Andioura ?

Comment donc ce jeune homme, dont les circonstances néfastes de la vie ont fait un Indien farouche, n’est-il pas heureux de cette prise qui flatte si fort son orgueil d’Iroquois, orgueil souvent poussé jusqu’au ridicule ?

Pourquoi ne se réjouit-il pas de cette capture, sur-